D’après certains sages, la terre serait le lieu d’expérimentation de nos plus fortes émotions.

Peu importe la véracité de cette affirmation, ou de quelle sorte de sage cette affirmation émane. Force est de constater l’ambivalence de nos émotions face à notre vie et les êtres qui la composent. Face à sa mère, l’enfant passe par plusieurs stades émotionnels, parfois cumulés…fusion, amour , désir, rejet, colère, haine,…autant de sentiments complexes qui varient au fil du temps et des époques de notre développement intime.

Il est presque impossible, face à des archétypes familiaux d’accéder à une forme de liberté ou de détachement….Plus souvent on sera dans le refoulement, voire le déni, que dans une authentique mise à distance d’émotion négative.

La seule issue positive serait la mise en place d’une forme interne de compassion, et pour soi et pour l’autre qui permet non seulement la résolution du conflit mais également le déplacement de la problématique et une re-convergence émotionnelle présente et vécue sous un angle diamétralement différent.

C’est en cela que les pratiques sadomasochistes sont intéressantes car elles éveillent en nous toute la gamme émotionnelle que nous réfrénons le plus souvent à l’âge adulte et que nous n’avons pas toujours eu la chance d’explorer au sein de notre vie enfantine …colère, jalousie, frustration, humiliation, sadisme, auto sabotage, mutisme, déni, dévalorisation de soi, impuissance, jouissance…..dépendance, amour, passion, tendresse…..autant d’émotions  révélées par le sm, comme si en rejouant sur le théâtre de la vie la gamme complète de notre émotivité, nous nous autorisions enfin à exister, à nous mettre en prise directe avec ce que nous sommes et ce que nous réfrénons le plus: nos émotions…..s’ouvrir à l’autre, c’est s’ouvrir à soi-même, s’autoriser à être ce que l’on est au plus profond de nous-mêmes, un être complexe, diffus, pas tout à fait lisse, parfois rugueux et asocial.

La théorie du rugueux  renvoie aux univers fractals, aux travaux de Benoit Mandelbrot plus utilisé dans les sciences économiques mais parfaitement transposables à la psyché humaine dans sa logique du vivant et sa conscience de l’être. En abordant l’être sous son angle rugueux, donc fractal, donc obligatoirement complexe, on tisse le pont entre notre psyché individuelle et les travaux de Yung et sa référence à l’inconscient collectif.

En extériorisant nos pratiques sadomasochismes les grands mythes de la psyché humaine ( l’allégorie de la caverne, le mythe des déesses-mères, la peur de la mort) nous ouvrons ainsi la porte à la sublimation de l’être à travers une pulsion résiduelle ainsi exorcisée.

Nettoyage de notre inconscient qui va toucher du doigt l’Ombre, l’Ombre terrible et terrifiante de la mère obscure, face d’un Janus trop souvent présenté comme protecteur….

Mère porteuse de vie mais également porteuse de mort….

L’époque actuelle répond parfaitement à nos besoins fondamentaux en termes de confort, de protection, d’opulence et de santé.

Cependant en dépit de tous nos efforts et des progrès vertigineux de la science, de la médecine, de toutes nos technologies, jamais nous ne sommes parvenus à répondre aux questions existentielles que tout être verticalisé se pose :

D’où venons-nous, quelles sont nos origines en tant qu’espèce et quel sens donner globalement à notre passage sur terre….

Jusqu'à présent seule une réponse individuelle à ces grandes questions fondamentales est possible et aucune réponse globale ou collective n’a pu être posée.

N’est ce pas le sens de cette phrase de Malraux qui affirmait que le 21 ème siècle serait mystique ou ne serait pas, que nous donnions tous un sens global à cette expérience que nous vivons les uns les autres comme espèce unique, apporter une réponse comme espèce peuplant cette terre nourricière ?

Voila peut-être l’émotion ultime que nous cherchons à toucher du doigt lorsque nous évoquons cette quête d’absolu dans notre recherche sado masochisme…..